En ‘terre de Satan’ aux Salomon

« Nous naviguons à vue, oui une vue paradisiaque mais la terre de Satan pour les navigants en quête de la risée magique, le souffle miraculeux qui nous refera prendre l’avantage ou, au moins, sortir de cette prison dorée, » écrit Martin Keruzoré, reporter embarqué sur Dongfeng pour l’étape 4 Melbourne-Hong Kong.

L’équipage de Charles Caudrelier se bat sans compter sur cette quatrième étape de la Volvo Ocean Race qui s’avère être une véritable guerre des nerfs alors que les concurrents naviguent à vue dans un Pot-au-Noir (zone de convergence entre les deux hémisphères), particulièrement coriace sur la route des Philippines. 



Dans une telle situation, on aimerait plonger dans l’immensité turquoise ou allumer le moteur pour aller juste un tout petit peu plus loin et retrouver un souffle d’air….mais, pour les coureurs au large, le vent est le seul moyen de propulsion autorisé et il manque à l’appel. Alors, englués dans la pétole, les marins de la Volvo Ocean Race, qui croisent dans le Nord-Est des Iles Salomon et cherchent à rallier Hong Kong, vivent l’enfer sur mer. Un lac, une mer d’huile où se reflètent les corps assommés par la chaleur de ce Pot-au-Noir bien plus éprouvant que celui traversé il y a quelques semaines en Atlantique.
 


« Nous souffrons beaucoup de la chaleur, il y a très peu de vent et les après-midis sont longues. Nous sommes dans un endroit que nous marins n’aimons pas du tout, c’est le Pot-au-Noir près du passage de l’équateur. Il est ici beaucoup plus virulent qu’en Atlantique, » confie Charles Caudrelier, entouré à son bord des Français Franck Cammas, Jérémie Beyou et Kevin Escoffier. « Derrière, les concurrents sont tous revenus quasiment sur nous. Il faut espérer que nous repartions vite car le premier qui redécollera sera bien placé pour la suite. »

En effet, après sept jours et demi de course depuis Melbourne, six des sept bateaux se tiennent en 10 milles (18 km). Ils progressent à toute petite vitesse, presque alignés comme sur une nouvelle ligne de départ. « La compétition est intense ! Chaque fois que je prends mon quart sur le pont, je vois au moins quatre autres bateaux autour de nous. Nous essayons d’être le premier à atteindre les nouveaux alizés. Et nous nous battons pour chaque mètre ! » témoigne la Néerlandaise Carolijn Brouwer.

« Une fois que nous sortirons du ‘Pot au noir’ comme l’appellent mes équipiers français ou du ‘trou noir’ comme j’aime l’appeler, nous accélérerons. Nous devons être très concentrés à chaque instant, un petit coup manqué que la concurrence n’a pas manqué et c’est un autre mètre de perdu. Et si nous naviguons bien, c’est un autre mètre gagné…et si ces mètres peuvent sembler petits, ils signifient beaucoup pour l’issue de l’étape. »


Car comme l’explique depuis la terre Fabien Delahaye (responsable analyse de performance du team) : « Dans ces cas-là, il faut s’armer de patience, rester concentrés et y croire. Le Pot-au-Noir est plus étroit dans l’Est de la flotte et le vent à aller chercher est de l’alizé de Nord-Est donc c’est bien d’être sur la droite du groupe. Maintenant, tout reste très incertain. Nerveusement, il faut tenir et je n’ai pas de doute sur le moral à bord. Ils s’accrochent et se tiennent prêts pour quand ils vont toucher le vent. Il y a encore 2 800 milles jusqu’aux Philippines et la route sera encore longue ensuite vers Hong Kong. La fin de l’étape sera une course de vitesse dans un alizé qui va souffler fort en approche de l’arrivée. »

Pour conclure, Carolijn, mère de famille qui dispute ici sa troisième Volvo Ocean Race, décrit très bien ce que représente pour elle cette chape de plomb et d’incertitude : « Pour être honnête, je ne sais pas ce qui est plus difficile ? Quand je suis arrivée à Melbourne après l’étape 3, disputée dans le Sud de l’Océan Indien, j’ai pensé que c’était la chose la plus difficile que je n’ai jamais faite. Mais maintenant, dans cette 4ème étape, nous ne sommes plus dans les vents extrêmes, ni dans le froid ou dans le ciel gris et humide mais nous sommes dans un autre extrême. Les cieux sont bleus, le soleil brûle nos corps, la température est extrêmement chaude ce qui rend nos corps moites et collants mais, ce qui est sûr, c’est que pour rien au monde, je n’aurais voulu rater ça ! »

 L’arrivée à Hong Kong est aujourd’hui estimée le 17 ou 18 janvier.


Relevé de positions à 13h00 GMT:


1. Turn The Tide on Plastic à 3,294 milles de l’arrivée

2. Vestas 11th Hour Racing à 4,24 milles du leader

3. Team Brunel à 5,98 milles
4. Team AkzoNobel à 6,9 milles

5. Dongfeng Race Team à 10,13 milles

6. MAPFRE à 10,14 milles

7. Team Sun Hung Kai / Scallywag à 30,10 milles

Équipage de Dongfeng pour l’étape 4, Melbourne-Hong Kong
Charles Caudrelier (FRA) – skipper

Franck Cammas (FRA) – navigateur

Daryl Wislang (NZL) – chef de quart

Jérémie Beyou (FRA) – chef de quart

Carolijn Brouwer (NL) – régleuse

Justine Mettraux (SUI) – régleuse

Kevin Escoffier (FRA) – équipier d’avant

Chen Jinhao ‘Horace’ (CHN) – équipier d’avant

Jack Bouttell (AUS/GBR) – équipier d’avant



Volvo Ocean Race – Classement général après trois étapes


1. MAPFRE (ESP), Xabi Fernandez, 29 points

2. Dongfeng Race Team (CHN), Charles Caudrelier, 23 points

3. Vestas 11th Hour Racing (USA-DAN), Charlie Enright, 23 points

4. Team Brunel (NED), Bouwe Bekking, 14 points

5. Sun Hung Kai/Scallywag (HK), David Witt, 11 points

6. team AkzoNobel (NED), Simeon Tienpont, 9 points

7. Turn the Tide on Plastic (UN), Dee Caffari, 6 points


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